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Euphorie des marchés : un palier a été franchi (rédigé le 12/11/2017)
Alors que le marché « haussier » va bientôt fêter ses neuf ans, ce qui en fait l’un des plus longs de l’Histoire, les investisseurs commencent à penser que plus rien de mal ne peut leur arriver. Une forme de douce euphorie – n’ayons pas peur des mots – s’installe dans les esprits. Aux Etats-Unis, les jeunes désireux de placer leur argent sont attirés comme jamais par la Bourse qu’ils n’ont vu que monter depuis qu’ils ont appris l’existence de Wall Street lors du krach de 2008. Selon un récent sondage réalisé par le gestionnaire d’actifs Legg Mason, 80 % des 18-34 ans sont désormais prêts à prendre plus de risques et 66 % à se tourner vers les actions. Du jamais vu. Les ouvertures de comptes, notamment chez les nouveaux courtiers en ligne, s’envolent. Ce type de comportement doit nous alerter sur l’excès de confiance des intervenants. Plus généralement, le traitement systématiquement « haussier » des nouvelles économiques, financières et géopolitiques laisse transparaître un décalage croissant entre la réalité et la perception des investisseurs.
Prenons la récente nomination par Donald Trump de Jerome Powell à la tête de la Réserve fédérale, en remplacement de Janet Yellen. Cette annonce a été accueillie sans aucun émoi. Pourtant, ce choix en apparence consensuel va inévitablement renforcer l’incertitude autour de la politique monétaire de la Fed. L’objectif du Président Trump est de réduire l’indépendance de la banque centrale à néant. Alors que le locataire de la Maison-Blanche a pour ambition de laisser filer le déficit et de relancer l’octroi de crédits, il a besoin d’une institution monétaire complaisante et à son écoute. Il serait ainsi malvenu de remonter significativement les taux d’intérêt au moment où l’Etat américain veut s’endetter plus et encourager les acteurs économiques à l’imiter... Jerome Powell, qui a jusqu’ici avancé masqué (il a toujours fait profil bas en votant comme la majorité des membres du comité de la politique monétaire), va donc avoir la responsabilité de modifier le plan établi par Janet Yellen et d’expliquer aux investisseurs les raisons d’un tel changement. Il s’agit d’un saut dans l’inconnu sous la gouverne d’un Président américain des plus inconstants. Le marché s’en est-il ému ? Absolument pas.
De même, le feuilleton de la réforme fiscale américaine est suivi avec une étonnante décontraction. Bien que le plan dévoilé par la Chambre des Représentants reprenne la majorité des propositions de la Maison-Blanche, la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés de 35 % à 20 % dès 2018, saluée plusieurs fois par les marchés, semble très hypothétique. De nombreux sénateurs s’apprêtent à bloquer ou à discuter ce point précis. Dans le scénario le plus favorable, la baisse serait étalée sur plusieurs années. Le choc positif tant attendu et anticipé par Wall Street n’aurait ainsi pas lieu. Un tel risque a été ignoré.
Enfin, il est intéressant de constater combien les bouleversements en cours en Arabie Saoudite et au Moyen-Orient ne sont pas pris en compte par les algorithmes. Coup sur coup, Riyad, sous la houlette du prince héritier Mohammed ben Salmane, a accusé le Liban de lui avoir déclaré la guerre et évoqué, après un tir de missile opéré par les Houthis du Yemen vers son territoire, une « agression militaire flagrante par le régime iranien qui pourrait équivaloir à un acte de guerre ». Dans les deux cas, l’Arabie Saoudite vise bel et bien l’Iran, son adversaire régional, lequel est régulièrement pointé du doigt par Donald Trump. Qui s’inquiète d’un possible conflit entre deux des plus grands producteurs de pétrole ? Quelques spécialistes mais pas les investisseurs.
Et pour cause, ces derniers ne suivent plus les fondamentaux mais achètent parce que le marché monte. Dans ce contexte, continuez de réduire vos horizons d’investissement, de concrétiser vos gains latents et de constituer des liquidités...
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