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La promesse d'un vaccin redonne de l'élan (rédigé le 20/05/2020)
En l’espace de cinq jours, le CAC 40 parisien n’affiche finalement qu’un gain très marginal. Mais ce n’est pas pour autant que les investisseurs ont limité leurs initiatives. Loin s’en faut même puisque la volatilité a été particulièrement élevée sur la semaine qui peut être séparée en deux périodes de temps.
En premier lieu, les marchés courbaient le chef sous le poids d’une nouvelle moisson de statistiques économiques témoignant, une fois de plus, des conséquences dévastatrices des mesures de confinement. L’accumulation des données négatives conduisait même le CAC40 sous les 4 200 pts, un niveau qu’il n’avait pas été testé depuis début avril. Ainsi, le mois dernier, les ventes de détail aux Etats-Unis se sont effondrées de -16,4%. La production industrielle y reculait, dans le même temps, de -11,2%. Et si la confiance des consommateurs connaissait une petite amélioration début mai, selon les données compilées par l’Université du Michigan, peu d’intervenants y trouvaient matière à s’en satisfaire, préférant attribuer cet optimisme au versement des aides gouvernementales. Mais ce n’est pas tout. Parmi les autres statistiques publiées au cours de la semaine, on citera également la nouvelle hausse des inscriptions hebdomadaires aux allocations chômage (+ 3 M, soit un chiffre supérieur aux attentes des économistes), ce qui porte à près de 36 millions le nombre de personnes ayant perdu leur emploi depuis le 21 mars, soit près d’un quart de la population active.
Parallèlement, le Président américain continuait d’user de la menace contre la Chine, par-delà les mensonges supposés de cette dernière dans la crise du covid-19. Et qu’importe, d’ailleurs, son angle d’attaque. Un jour, il s’agissait de brider les capacités de la firme chinoise Huawei dans le développement de semi-conducteurs sur la base de technologies américaines. Et Donald Trump d’évoquer une menace pour la sécurité nationale. La Chine annonçait de possibles mesures de rétorsion, ce qui pesait immédiatement sur les géants Boeing ou encore Apple.
Un autre jour, le milliardaire américain fustigeait l’Organisation mondiale de la santé (OMS), accusée d’être à la solde de Pékin, d’avoir sciemment minimisé l’épidémie et conduit le monde dans un épisode récessif inédit.
Ces nouvelles tensions ont manifestement fini de convaincre le brésilien Roberto Azevêdo d’annoncer sa démission de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), officiellement pour des raisons personnelles. Mais depuis maintenant deux années, l’OMC assiste, sans pouvoir réagir, à la montée en puissance des tensions commerciales entre les Etats-Unis, la Chine et le Vieux Continent ou, plus généralement, au retour du protectionnisme. Son rôle dans la promotion du libre-échange semble devoir désormais appartenir à un autre temps.
Du côté de l’épidémie, le risque de la 2ème vague restait bien présent. Si Donald Trump continuait d’appeler de ses vœux un déconfinement rapide destiné à relancer l’activité, les autorités sanitaires américaines s’inquiétaient au contraire d’un tel scénario.
Enfin, c’est la Réserve fédérale américaine qui a déçu les attentes, une fois n’est pas coutume. Certes, et comme elle s’y était engagée, la Fed a recommencé à racheter de la dette d’entreprises via des trackers (ETF). Le prochain volet de son action consistera, cette fois, à acquérir de la dette directement auprès des émetteurs. Et pas uniquement des titres bien notés puisque les junk bonds (obligations "pourries") seront également de la fête... Ces annonces, déjà connues, avaient permis aux marchés de rebondir très nettement dans l’anticipation d’un nouvel afflux de liquidités. Du déjà vu et revu, évidemment, mais l’effet d’une telle politique reste salué en Bourse depuis maintenant plus de... 10 ans.
Le risque est évidemment, pour les marchés, d’en vouloir toujours plus. Et c’est ainsi que plusieurs dirigeants de la Réserve fédérale, dont son Président Jerome Powell, ont déçu les intervenants en déclarant rejeter l’éventualité de taux d’intérêts négatifs. Au grand dam de Donald Trump qui réclame une action bien plus poussée de la Fed. Enfin, ce sont encore des déclarations du responsable de la Fed qui ont conduit les indices à reculer en fin de semaine. Celui-ci a prévenu que les dégâts causés par le coronavirus devraient avoir un impact durable et sans doute plus long que prévu sur l’économie américaine. Et le Président de la Réserve fédérale d’évoquer des destructions d’emplois à long terme et des faillites à même de peser sur les qualifications des salariés, la dette des ménages et la productivité. De fait, l’optimisme des investisseurs semblait avoir été bien trop élevé au regard de cette peinture sans doute plus réaliste de la situation.
Et pourtant, dans un second temps et après le recul significatif observé par les indices, les marchés sont repartis de l’avant de façon très enthousiaste, le CAC40 prenant ainsi +5,27% sur la seule séance du lundi 18 mai. Deux éléments ont favorisé ce changement de cap.
En premier lieu, Jerome Powell faisait, en quelque sorte, amende honorable sur les ondes cette fois de CBS en date du dimanche 17 mai. Moins sombre qu’il ne l’avait été quelques jours plus tôt, il évoquait alors une récession d’une ampleur moindre à celle de la Grande dépression. Il conditionnait, finalement, une reprise rapide de l’activité à l’arrivée d’un vaccin. Et justement, une entreprise de biotechnologie américaine indiquait lundi avoir réalisé d’importantes avancées à ce sujet.
Les marchés ont salué la nouvelle, sans doute avec un enthousiasme quelque peu déplacé mais qui s’explique par la profonde crise actuelle et l’envie de tourner la page au plus vite. L’emballement était aussitôt de mise, et plus spécifiquement sur les valeurs cycliques et les matières premières. Ainsi, le pétrole continuait de rebondir en direction des 32 $ pour le baril de qualité WTI.
Ainsi, pour être plus précis, le laboratoire américain Moderna, financé par le gouvernement des Etats-Unis, a fait état de "données intérimaires positives" dans la recherche d’un vaccin contre le coronavirus. Ce dernier, dans le cadre d’une étude de phase I, semble susciter une réponse immunitaire chez 8 personnes (sur 45 personnes testées, jeunes et en bonne santé), sans effets désirables. Le laboratoire américain a expérimenté son vaccin sur des humains, dès le 16 mars. À ce jour, seuls 12 essais cliniques ont commencé avec des volontaires humains. L’efficacité du vaccin de la firme Moderna ne pourra être validée qu’après un test à grande échelle sur des patients plus âgés et présentant plus de risques. Donald Trump a salué la nouvelle qu’il a qualifiée de "stupéfiante". Mais il y a encore beaucoup à faire avant de crier victoire.
Les marchés tentent de se rassurer. Espérons que ce vaccin candidat sera le bon. Mais gardons-nous de tout emballement alors que les données du laboratoire sont encore très parcellaires et imprécises. On relèvera d’ailleurs que la société a profité de cette annonce pour lancer une augmentation de capital de 1,5 Md $. Ce qui n’aide pas à y voir plus clair.
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