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AB Science : une grande annonce (rédigé le 08/02/2012)

Le dossier d’introduction d’AB Science s’est présenté à nous voici presque deux ans dans un contexte bien différent d’aujourd’hui. Les sociétés candidates à une cotation en Bourse étaient nombreuses dans un marché qui s’inscrivait alors au tout début d’une phase de redressement au lendemain du choc des « subprimes ». Bref, la crise grecque n’avait pas encore jeté le discrédit sur les marchés d’actions européens. Dès la première lecture du dossier, il nous a sauté aux yeux que la société offrait un profil atypique et surtout qu’elle constituait une opportunité rare.

 

Une phase II qui réveille le titre

 

Dirigée par un ancien de la distribution, Alain Moussy, AB Science se présentait aux investisseurs avec une molécule phare,

le masitinib (un inhibiteur de tyrosine kinase), un produit vétérinaire commercialisé en France et bientôt aux états-Unis, et enfin trois phases III en médecine humaine (pancréas, GIST et mastocytose). Dans un premier temps, l’action était proposée dans une fourchette comprise entre 13,95 € et 17,05 €. Face à la frilosité des investisseurs, encore échaudés par la crise et le comportement des petites capitalisations, le titre faisait son introduction à 12,65 €,

ce qui valorisait la société environ 370 M €. Deux ans plus tard, le profil de la société s’est considérablement enrichi. La semaine passée, AB Science a notamment dévoilé des résultats exceptionnels dans une étude clinique en phase II portant sur un cancer gastro-intestinale, le GIST. Les travaux visaient des patients résistant au Glivec de Novartis et étaient menés en comparaison du Sutent, commercialisé par Pfizer en seconde ligne de traitement. Après dix-huit mois d’étude, 79 % des patients sous masitinib étaient toujours en vie, contre 20 % de ceux recevant du Sutent. Après deux ans, 54 % des patients traités avec le masitinib étaient toujours en vie, contre aucun pour le Sutent. Outre l’amélioration très nette de la survie, le masitinib semble beaucoup mieux toléré, ce qui signifie qu’il provoque moins d’effets secondaires.

 

A partir de là, tous les espoirs sont permis. Le marché du GIST est estimé à 750 M €, dont un tiers serait détenu par le Sutent. Le schéma classique est de lancer une phase III, dernière étape avant l’enregistrement commercial du produit. Reste qu’une alternative existe : compte tenu des résultats mesurés, il est possible que les autorités sanitaires décident d’accélérer le processus. Comment en effet croire que des patients atteints du GIST accepteront d’être traités au Sutent dans le cadre d’une phase III après l’annonce de tels résultats ? Comme l’a souligné la direction d’AB Science, il y a là un problème d’éthique sur lequel les autorités devront se pencher.

 

Une biotech ? Non, une junior pharmaceutique

 

Ce résultat en phase II a enfin mis la lumière sur le titre. Pour autant, il n’était pas attendu et constitue donc un atout supplémentaire pour la valorisation de la société. Actuellement, celle-ci réalise un chiffre d’affaires encore symbolique et de surcroît intégralement en médecine vétérinaire.

 

La phase II dans le GIST démontre qu’elle pourrait, d’ici deux à trois ans, s’accaparer la part de marché du Sutent. Sur cette base, la valorisation actuelle d’AB Science, autour de 400 M €, nous semble dérisoire : elle ne représente qu’une fois et demi le chiffre d’affaires potentiel de ce seul traitement. Dans le même temps, la capitalisation n’a pas évolué en deux ans alors que le groupe est désormais engagé dans huit phases III en médecine humaine (pancréas, GIST en première ligne, mastocytose, asthme sévère persistant, polyarthrite rhumatoïde, myélome multiple, une certaine forme de mélanome métastatique et sclérose en plaques progressive). AB Science compte en outre une dizaine de phases II dont le GIST en seconde ligne que nous évoquions plus haut. Ce résultat renforce d’ailleurs la crédibilité d’AB Science : c’est en effet dans l’oncologie que le taux de succès des produits en développement est le plus faible, selon Biomedtracker. Sur le plan financier, le fait que toutes ces études portent uniquement sur le masitinib permet de réaliser des économies d’échelle dans le développement. La société n’a consommé que 5,9 M € sur les neuf premiers mois de l’année 2011 alors qu’elle détient plus de 30 M € en trésorerie, notamment après un emprunt obligataire réalisé l’été dernier. Globalement, il convient en outre de souligner qu’AB Science n’est pas à proprement parler une « biotech » mais bien un laboratoire pharmaceutique en devenir. L’objectif affiché d’Alain Moussy (qui détient 42 % du capital) n’est ainsi pas de réaliser un « coup » mais de développer sa molécule (puis d’autres ?) de manière indépendante. Cette volonté sécurise la rétention des marges et donc le potentiel de valorisation de la valeur.

 

Compte tenu de la richesse du portefeuille de produits en développement, il serait d’ailleurs étonnant qu’aucune offre d’achat ne lui été faite par l’un des grands laboratoires mondiaux. La résonance qu’a eu le résultat de phase II dans le GIST au niveau international laisse espérer que des investisseurs américains se laisseront séduire par ce dossier. Or, à Wall Street, les valorisations sont tout autre : Pharmasset a par exemple été racheté par Gilead pour 11 Mds $ alors que son chiffre d’affaires ne dépassait pas 1 M $ et que son principal actif était une phase III dans l’hépatite C.

 

Notre avis

La nouvelle a constitué un catalyseur pour réveiller cette très belle endormie (+ 111 % sur la semaine). S’il convient de garder les pieds sur terre, ne boudons pas pour autant notre plaisir. Pour commencer, nous relevons notre objectif à 35 €. à ce prix, nous valorisons plus concrètement le potentiel du masitinib en seconde ligne de traitement du GIST. Cet objectif ne devrait toutefois constituer qu’une étape pour prendre une partie de nos bénéfices mais en aucun cas pour solder la ligne. La prochaine grande annonce concernera la phase III dans le traitement du pancréas et sera dévoilée au printemps. Les attentes ne sont pas élevées en ce qui concerne cette pathologie sur laquelle les plus grands laboratoires ont buté. Dans ces conditions, tout résultat autre qu’un échec pur et simple constituera une surprise positive, selon nous.

Un dernier mot : attention à la volatilité. Le titre a attiré de nombreux opérateurs en quête de gains faciles. Ne vous laissez pas perturber par les fortes variations (le titre sera admis au SRD « long » le 24 février prochain).

 

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